mercredi 28 mai 2014

HER


Il y a quelques jours maintenant j'ai eu l'occasion de visionner HER.
Je ne savais pas trop à quoi m'attendre : les retours que l'on m'en faisait étaient plutôt bons, quoique peu nombreux, et les critiques semblaient globalement favorables. Et puis j'avoue que la bande annonce m'avait suffisamment intriguée pour m'inciter à le voir.
C'est donc l'esprit ouvert que j'ai abordé le film.

HER est la dernière réalisation de Spike Jonze a qui l'on devait déjà quelques œuvres curieuses comme Dans la peau de John Malkovich ou Max et les maximonstres. De ce que j'en avais compris, il s'agissait ici de suivre le quotidien d'un homme tombant amoureux d'une I.A. et je m'attendais donc avant-tout à une comédie sentimentale. 

Du coup le film m'a - agréablement - surpris à plus d'un titre. Premièrement je ne m'attendais pas du tout à ce que ce soit un film d'anticipation ; peut-être l'avantage de ne pas m'être trop renseigné avant de le voir. Car ici nous sommes bien dans futur proche (2025) où la technologie a su se faire discrète, demeurer fonctionnelle sans être invasive. La plus grande partie du film est tournée dans des tours ou au pieds de buildings modernes et magnifiques, le tout sous un soleil radieux, accentuant ainsi le côté moderne.

Deuxième constat : aucune voiture - du moins que je m'en souvienne - n'est visible et les seuls moyens de transports employés sont collectifs : le métro et le train. La mode est également très décontractée et en dehors du spleen de personnage principal - incarné à l'écran par Joaqim Phoenix - et de celui de ses amis proches, la tristesse semble être absente des visages du reste de la population filmée.

Tout cela prit conjointement contribue à créer une impression d'"urbanisme bienheureux" et donnant à l'oeuvre un côté optimiste rafraîchissant. Ici on n'est pas dans un urbanisme invasif et glauque mais plutôt dans une vision SF qui n'aurait pas déparée dans la littérature de genre des années 70. D'où ce terme de rétro-futurisme que j'ai vu employé à plusieurs reprises dans différents articles lors de la préparation de ce billet. Bien que personnellement je trouve cet emploi un peu réducteur dans le cas présent du fait d'un manque de références explicites, le film partage avec eux un côté optimiste et positif.

Théodore - le héros de l'histoire - dans un plan extérieur.
Mais tout cela n'est que le décorum servant le propos car le film s’attache bien au traitement des sentiments et des relations humaines. Théodore, le héros du film, ne parvient pas à tourner la page de son couple qui a pourtant volé en éclats depuis bientôt un an. Le couple de sa plus proche amie est lisse, parfait, clinquant, factice : l'illusion du bonheur semble l'ultime recours à un bonheur fuyant. Théodore sait qu'il a aimé avec passion, qu'il y a eu des joies mais aussi beaucoup de peines. Mais que lui resterait-il ensuite ? Remplir un vide par un autre vide ? Une supercherie ? Voila pourquoi il hésite à signer les papiers du divorces. 

Car si le cadre de vie est devenu presque idyllique, enfin c'est une certaine vision de l'Eden, les gens y semblent à la recherche de sen(timent)s et cela est montré par le réalisateur de bien des manières. Premièrement par le propre métier du héros : ce dernier est écrivain publique, rédigeant pour d'autres des lettres manuscrites. A lui de mettre des mots sur la passion des autres, exprimer ce qu'eux-même ne parviennent pas à formuler (à vivre ?)

Le traitement même de la technologie dans le long métrage est également très révélateur. En effet, ici nulle évocation de médias de divertissement de masse : aucune télévision n'est montrées, aucune radio. On ne trouve que des ordinateurs ou des mobiles dont l'aspect vintage renforce leur côté purement fonctionnel. Tout est en commande vocale et ne nécessite aucune manipulation directe, preuve s'il en est qu'il s'agit bien ici de communiquer, que cela soit avec une I.A. ou bien avec des personnes. Le seul élément vraiment high-tech explicitement visible est la console de jeu qu'utilise Théodore pour tromper son chagrin et dont on n'observe que la projection holographique. Là encore, l'expérience ludique présentée est interactive et renvoie aux interactions humaines.

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Malgré sont traitement léger, presque détaché et sensible, HER se révèle en réalité bien plus subtil qu'il ne le semble de prime abord. En allant à contre-pied de nos habitudes de communications actuelles née du web 2.0, il ne fait que renforcer l'importance du simple fait de communiquer dans les relations humaines et que les réseaux sociaux ne sont qu'un moyen supplémentaire, pas une solution.

La réalisation est sobre et il est reposant d'avoir un film profond et calme, sans cadrage épileptique. Joaqim Phoenix est impeccable de bout en bout en campant un Théodore touchant et toujours juste. Scarlett Johansson, bien que totalement absente de l'écran vu qu'elle ne prête que sa voix à Samantha, l'I.A. auto-baptisée du héros, parvient cependant à lui donner une âme ; enfin pour peu qu'on l'ai vu en VO.

Je vais pas m'étendre davantage sur ce film qui aborde en parallèle, sans mot dire, de nombreuses thématiques chères  à  la littérature d'anticipation. Pouvant se regarder à différents niveaux, il me faudra à mon avis plusieurs visionnages pour en appréhender la pleine mesure. Ai-je trouvé que HER était un bon film ? Ma réponse est oui. Est-ce qu'il vous plaira ? Je l'espère autant qu'il m'a séduit. Pour ce qui me concerne, c'est ma première claque cinématographique de l'année.

HER

Un film de Spike Jonze
Avec Joaqim PhoenixScarlett Johansson
Genre drame, romance, science-fiction

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